Perdu dans le fil de ses pensées, Melanisoheni mit un moment à se rendre compte qu’un regard était posé sur lui. Ses yeux quittèrent le feu qui flambait joyeusement pour observer au-delà, et constater que son compagnon le fixait avec insistance. Son air était distrait, un peu distant. S’y reflétaient des choses que Mel peinait à décrypter. Il crut y voir un instant une forme de fascination mais balaya vite l’idée de son esprit. Qu’est-ce qui pourrait lui arracher une émotion pareille, et sur sa personne qui plus est ? Depuis le temps qu’ils se connaissaient… Delinaël ne réagit pas alors qu’il devenait évident qu’il avait été repéré. Pourtant, son attention demeurait, tenace. Mel se demanda un instant s’il avait oublié quelque chose, perdu le fil d’une conversation laissée en suspens. Rien ne lui vint à l’esprit. Et puis, le guerrier ne se serait-il pas manifesté si cela avait été le cas, au lieu de garder le silence ? — Qu’y a-t-il ? Sa voix résonna avec gravité entre ces parois rocheuses qui les enserraient dans une cloche étroite. Ils avaient trouvé refuge dans cette caverne alors que le jour déclinait, et la lune dominait désormais le ciel nocturne. Depuis leur arrivée, ils n’avaient fait qu’établir leur camp. Comme le bois était maigre et rare en ces lieux, Mel avait invoqué des flammes par magie sur les quelques branches sèches qu’ils avaient réussi à réunir. Ils s’étaient ensuite installés devant le feu sans prononcer un seul mot et n’en avaient lâché aucun depuis. Peut-être était-ce étrange de la part de Delinaël, songea-t-il alors. Mais pas tant que cela. Il avait ses moments de silence méditatif, lui aussi. Delinaël cligna des yeux à l’interpellation et leva le nez vers Mel. D’abord surpris, il lui adressa un sourire innocent. Mel le jaugea d’un œil interrogateur. Il allait insister lorsque son compagnon se décida à répondre : — Je regardais tes tatouages. — Mes tatouages ? Quelques secondes s’égrenèrent, incertaines. Mel ne comprenait pas. Il les avait déjà, à leur rencontre, alors pourquoi se focaliser dessus à présent ? La silhouette musclée du guerrier s’agita et traduisit son léger inconfort – ou alors, il avait soudain décrété de changer de position à cet instant précis. Difficile à dire. — Pourquoi mes tatouages ? Ils étaient permanents, aussi ils n’étaient pas supposés se détériorer ou s’effacer avec le temps, Mel en était sûr. La seule différence avec la situation habituelle était la légère lueur qui les soulignait, tandis qu’il maintenait les flammes d’une simple pensée. Dans le cas contraire, l’air agité aurait tôt fait d’éteindre le foyer pour ne laisser que des braises. La protection que l’orifice rocheux leur offrait était mince. Il aperçut alors la lueur de curiosité avide dans les yeux de son compagnon et en fut étonné. Étaient-ce réellement ses tatouages qui provoquaient une telle réaction ? Delinaël les avait pourtant déjà vus actifs. Pourquoi maintenant ? A moins qu’il n’eût jamais remarqué son intérêt pour eux jusque-là ? — Ils me rendent curieux, avoua Delinaël d’un ton léger. Comme ta magie.
Delinaël - Mel/Del - Abracadabra 1/2
Delinaël ne réagit pas alors qu’il devenait évident qu’il avait été repéré. Pourtant, son attention demeurait, tenace. Mel se demanda un instant s’il avait oublié quelque chose, perdu le fil d’une conversation laissée en suspens. Rien ne lui vint à l’esprit. Et puis, le guerrier ne se serait-il pas manifesté si cela avait été le cas, au lieu de garder le silence ?
— Qu’y a-t-il ?
Sa voix résonna avec gravité entre ces parois rocheuses qui les enserraient dans une cloche étroite. Ils avaient trouvé refuge dans cette caverne alors que le jour déclinait, et la lune dominait désormais le ciel nocturne. Depuis leur arrivée, ils n’avaient fait qu’établir leur camp. Comme le bois était maigre et rare en ces lieux, Mel avait invoqué des flammes par magie sur les quelques branches sèches qu’ils avaient réussi à réunir. Ils s’étaient ensuite installés devant le feu sans prononcer un seul mot et n’en avaient lâché aucun depuis. Peut-être était-ce étrange de la part de Delinaël, songea-t-il alors. Mais pas tant que cela. Il avait ses moments de silence méditatif, lui aussi.
Delinaël cligna des yeux à l’interpellation et leva le nez vers Mel. D’abord surpris, il lui adressa un sourire innocent. Mel le jaugea d’un œil interrogateur. Il allait insister lorsque son compagnon se décida à répondre :
— Je regardais tes tatouages.
— Mes tatouages ?
Quelques secondes s’égrenèrent, incertaines. Mel ne comprenait pas. Il les avait déjà, à leur rencontre, alors pourquoi se focaliser dessus à présent ?
La silhouette musclée du guerrier s’agita et traduisit son léger inconfort – ou alors, il avait soudain décrété de changer de position à cet instant précis. Difficile à dire.
— Pourquoi mes tatouages ?
Ils étaient permanents, aussi ils n’étaient pas supposés se détériorer ou s’effacer avec le temps, Mel en était sûr. La seule différence avec la situation habituelle était la légère lueur qui les soulignait, tandis qu’il maintenait les flammes d’une simple pensée. Dans le cas contraire, l’air agité aurait tôt fait d’éteindre le foyer pour ne laisser que des braises. La protection que l’orifice rocheux leur offrait était mince.
Il aperçut alors la lueur de curiosité avide dans les yeux de son compagnon et en fut étonné. Étaient-ce réellement ses tatouages qui provoquaient une telle réaction ? Delinaël les avait pourtant déjà vus actifs. Pourquoi maintenant ? A moins qu’il n’eût jamais remarqué son intérêt pour eux jusque-là ?
— Ils me rendent curieux, avoua Delinaël d’un ton léger. Comme ta magie.